BREF APERÇU DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE AU XIXème SIÈCLE
I - Généralités.
Il n'est pas dans mes objectifs de faire une "Géographie" ou une "Histoire" de la Nouvelle-Calédonie, je pense toutefois qu'il est nécessaire de rappeler quelques faits essentiels tenant à la nature même de cette ancienne colonie du bout du monde qui, à cause de son éloignement fut trop souvent mal connue sinon méconnue en métropole.
La Nouvelle-Calédonie représente un groupe d'îles situé dans le sud-ouest de l'océan Pacifique et dont l'extrême sud atteint le tropique du Capricorne. Cet archipel comprend la Grande Terre ou Nouvelle-Calédonie au sens restreint du terme, les îles Loyauté plus à l'est, l'île des Pins au sud-est et quelques petites îles au nord-ouest constituant la groupe des Bélep.
La Grande Terre est une île montagneuse de près de quatre cents kilomètres de long sur à peine cinquante de large, entourée de même que la plupart des îles et îlots de l'archipel, d'une ceinture de récifs coralliens délimitant un lagon poissonneux.
L'ensemble des terres émergées représente plus de dix-neuf mille kilomètres carrés.
Les terres habitées les plus proches sont les Nouvelles-Hébrides, l'actuel Vanuatu, à trois cents kilomètres, l'Australie à mille cinq cents kilomètres et la Nouvelle-Zélande à mille sept cents kilomètres.
Au cours, de son second voyage dans le Pacifique, le capitaine Cook découvrit la Grande Terre le 5 septembre 1774.
La Nouvelle-Calédonie était alors peuplée de tribus mélanésiennes très fractionnées en petites sociétés à caractère patriarcal, parlant des dialectes différents. Ignorant l'usage du métal, les canaques, comme on les appellera plus tard, pratiquaient une agriculture primitive mais socialement organisée, produisant ignames et taros qui représentaient la base alimentaire de la communauté. Ils ne semblent pas avoir été très pêcheurs et le gibier autochtone n'était constitué que de petites espèces assez difficiles à chasser, on a vu là un facteur déterminant de l'anthropophagie qu'ils pratiquaient selon des rites établis, notamment au cours de guerres tribales toujours fréquentes.
II - Repères chronologiques.
1827 : Dumont d'Urville reconnaît l'archipel des Loyauté.
1839 : À partir de cette année, on est assuré que baleiniers et santaliers fréquentent les eaux de l'archipel.
1841 : Arrivée des premiers missionnaires protestants.
1843.
- 22 décembre : La première mission catholique dirigée par Mgr Douarre débarque à Balade et s'y établit.
1853.
- 27 avril : Décès de Mgr Douarre à Balade.
- 24 septembre : Le contre amiral Febvrier-Despointes prend possession de la Nouvelle-Calédonie au nom de la France.
1854.
- 25 juin : Le capitaine de vaisseau Tardy de Montravel fonde Port-de-France qui deviendra Nouméa.
1855.
- 18 janvier : Le capitaine de vaisseau du Bouzet est nommé gouverneur des Établissements Français de l'Océanie.
Le gouverneur étant habituellement stationné à Tahiti, un "commandant particulier" dirigeait l'Établissement de la Nouvelle-Calédonie ; ce furent :
- du 18 janvier 1855 au 21 décembre 1858, le chef de bataillon Testard ;
- du 25 mai 1856 au 5 mai 1857, le capitaine de corvette Le Bris, avec le titre de "commandant supérieur" ;
- du 21 décembre 1858 au 20 mars 1859, le capitaine du génie Roussel ;
- du 20 mars 1859 au 10 janvier 1860, le chef de bataillon Durand.
1855.
- 13 mars : Arrivée des premiers colons à Balade par le brick autrichien Splendido.
- 21 avril : Première "affaire de Pouébo".
- 28 mai : Les Maristes abandonnent Balade et créent la réduction de la Conception près de Saint-Louis, au voisinage de Port-de-France.
- 31 décembre : Première organisation du service administratif.
De 1855 à 1862 éclatent de nombreux mouvements hostiles de la part des indigènes, dans le nord (Pouébo, Wagap) et dans la presqu'île de Port-de-France.
1857.
- 30 novembre : Création de l'état civil de Port-de-France.
En 1857 et 1858, le Gouvernement accorde de grandes concessions, jusqu'à 40 000 ha., dont les concessionnaires,- Byrne et Brown par exemple,- ne prennent d'ailleurs pas possession ; mais le 15 décembre 1857, 3 200 ha situées à la Conception sont donnés à la Mission mariste en concession gratuite.
1859.
- 22 mai : Le capitaine de vaisseau Saisset est nommé gouverneur des Établissements Français de l'Océanie.
- 1er juin : Fondation de la commune de Port-de-France.
- 13 juin : Le gouverneur Saisset prend un décret séparant l'administration de la Nouvelle-Calédonie de celle de Tahiti. Trois jours auparavant il avait ordonné les premières expropriations de tribus pour cause de révolte.
- 25 juin : Le premier Conseil municipal de Port-de-France est mis en place, il est constitué du maire, Coudelou, des adjoints Bouillaud et Mounet.
- 2 octobre : Publication du premier numéro du Moniteur Impérial de la Nouvelle-Calédonie.
1860.
- 14 janvier : Décret impérial faisant de la Nouvelle-Calédonie et dépendances une colonie distincte des Etablissements Français de l'Océanie à compter du 1er juillet.
- 26 février : Le gouverneur Saisset quitte la colonie qui se trouve placée sous l'autorité du chef de bataillon Durand dont le titre devient, à partir du 1er juillet, "commandant de la Nouvelle-Calédonie et dépendances".
L'année 1860 est marquée par des épidémies qui se répandent parmi les indigènes et se prolongent durant le début de 1861.
1861.
- 13 février : Décès de James Paddon, pionnier et commerçant installé sur le site de Port-de-France dès 1851.
1862.
- 2 juin : Arrivée du capitaine de vaisseau Guillain, premier gouverneur de la Nouvelle-Calédonie et dépendances.
l864.
- 22 janvier : Arrêté instituant le Secrétariat colonial.
- 8 février : Arrêté autorisant l'association de Yaté.
- 20 février : Arrêté instituant le bagne à la Nouvelle-Calédonie.
- 28 mai : Inauguration du pénitencier.
1865.
- 17 février : Suppression de l'atelier de lithographie du Gouvernement.
- 23 octobre : Approbation par le Ministère de la mise en adjudication d'un service régulier entre Bordeaux, Tahiti et Nouvelle-Calédonie. Ce service est adjugé le 10 octobre 1866 à la maison Ballande.
1866.
- 2 juin : Port-de-France devient Nouméa.
1870.
- 13 mars : Le gouverneur Guillain quitte la colonie ; le capitaine de vaisseau de La Richerie, nouveau gouverneur, prend ses fonctions le 26 août.
1871.
- 31 janvier : Arrivée du premier navire à vapeur touchant la Nouvelle-Calédonie.
1872.
- 24 juin : Arrêté sur la déportation des condamnés de la Commune.
- 25 juin : Première communication par câble entre l'Angleterre et l'Australie.
- 13 juillet : Mise en adjudication d'un service de "tour de côte". Ludovic Marchand est déclaré adjudicataire. Ce service échoit à la Compagnie de la Nouvelle-Calédonie le 14 février 1873.
- 5 août : À Paris, dépôt des statuts de la Compagnie de la Nouvelle-Calédonie.
- 29 septembre : Arrivée du premier convoi de déportés de la Commune.
1873.
- 4 avril : Ferdinand Vitte est nommé vicaire apostolique de la Nouvelle-Calédonie.
- 30 décembre : Arrêté sur la création des centres agricoles.
La découverte de gisements de cuivre et leur mise en exploitation par la compagnie de la Balade (du nom donné à la mine) dominée par John Higginson, promotionne l'extrême nord calédonien.
1874.
- 20 mars : Évasion de Rochefort. La conséquence de cette évasion est l'enquête menée par le contre-amiral Ribourt investi des pleins pouvoirs en tant que commissaire du Gouvernement, "pour examiner la situation des territoires de la déportation". Cette enquête, qui devait durer du 21 juin au 21 août, laissera un sinistre et durable souvenir à Nouméa ;
- 26 mars : Premier arrêté sur l'introduction de travailleurs africains et océaniens.
- 5 octobre : Nomination d'un Conseil municipal de Nouméa, Arthur Pelletier est nommé maire. Le précédent Conseil municipal, créé en 1859, n'avait duré qu'une année faute de fonds.
Le 5 octobre également est promulgué le décret du 14 juillet 1874 autorisant la création de la Banque de la Nouvelle-Calédonie, issue, avec la Société foncière calédonienne, de la Compagnie de la Nouvelle-Calédonie ;
- 11 décembre : Arrêté n° 1478, "M. Dubain est autorisé à établir une imprimerie civile à Nouméa".
Dans le courant de ce mois paraît le premier numéro des Petites Affiches de la Nouvelle-Calédonie.
1875.
- 27 février : Prise de fonction du gouverneur de Pritzbuer, capitaine de vaisseau. Le commandant Charrière devient directeur de l'Administration pénitentiaire.
- 1er mars : arrêté promulguant dans la colonie le décret organique du 12 décembre 1874 concernant le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, définissant les pouvoirs du gouverneur et instaurant une Direction de l'intérieur.
- 22 juin : Étude sur le cantonnement des indigènes.
- 16 août : Second arrêté sur l'introduction des travailleurs africains et océaniens.
Cette année-là, un réseau intérieur de lignes télégraphiques établit une liaison entre les divers centres de l'intérieur et le chef-lieu.
1876.
- 6 mars : Arrêté sur le cantonnement des indigènes.
- 17 décembre : Délimitation du territoire de certaines tribus (Houailou, Canala, Nakéty).
1877.
- 5 février : À Septèmes-les-Vallons, Bouches-du-Rhône est réalisée la première coulée de nickel de Nouvelle-Calédonie suivant le procédé Garnier.
- 10 février : Inauguration de la fonderie de la Pointe Chaleix (Nouméa).
-16 novembre : La Banque de la Nouvelle-Calédonie est autorisée à surseoir ses paiements.
- 1er décembre : Suspension du journal Les Petites Affiches de la Nouvelle-Calédonie.
1878.
- 7 janvier : Les billets de la Banque de la Nouvelle-Calédonie n'ont plus cours légal.
- 11 avril : Le capitaine de vaisseau Olry prend ses fonctions de gouverneur.
- 19 juin : Début de la grande insurrection canaque.
1879.
- 15 janvier : Décret de grâce des déportés de la Commune.
- 8 mars : Décret établissant des institutions municipales pour Nouméa.
- 12 juillet : Mise en place du premier Conseil municipal élu, Jean-Baptiste Dézarnaulds devient maire.
- 6 août : Nomination des Commissions municipales des centres de l'intérieur.
- 29 octobre : Création de la Chambre de commerce de Nouméa.
1880.
- 15 avril : Mgr Fraysse, nommé évêque d'Abila, succède à Mgr Vitte à la tête du clergé de Nouvelle-Calédonie.
- 14 juin : Promulgation du décret du 3 avril 1880 sur les congrégations religieuses non autorisées.
- 18 août : Prise de fonctions du gouverneur Amédée Courbet, alors capitaine de vaisseau.
- 21 août : Arrêté rendant applicable à la Nouvelle-Calédonie la législation française sur la presse.
- 2 septembre : Promulgation de la loi d'amnistie des déportés, en date du 11 juillet.
1881.
- 9 novembre : Décret d'application à. la colonie de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse.
Cette année-là, la baisse du prix du nickel et la mévente du minerai amorcent une crise économique locale.
1882.
- 29 septembre : Prise de fonctions du gouverneur Pallu de La Barrière, capitaine de vaisseau.
Début des grands travaux de routes.
- Octobre : Fondation de la Compagnie calédonienne des Nouvelles-Hébrides.
- 7 novembre : Installation du Conseil municipal de Nouméa dans les anciens locaux de la Banque de la Nouvelle-Calédonie.
1883.
- 22 avril : Première coulée de cobalt à la fonderie de la Pointe Chaleix.
- 19 octobre : Institution d'un Conseil supérieur auprès du Ministère de la Marine et des Colonies.
1884.
- 10 janvier : Arrêté réglant diverses dispositions pour la nomination d'un délégué près le Conseil supérieur des Colonies.
- 9 mars : Léon Moncelon est élu délégué.
- 5 avril : Promulgation de la loi du 29 mars 1884, sur les bonnes mœurs qui complète la loi de 1881 sur la presse.
- 12 mai : Création de la Chambre d'agriculture.
- 22 juillet : Adolphe Le Boucher, premier gouverneur civil de la Nouvelle-Calédonie et dépendances prend ses fonctions.
- 30 septembre : Promulgation de la loi du 5 avril 1884 sur l'organisation municipale.
- 27 octobre : Promulgation du décret du 18 août 1884 délimitant le domaine pénitentiaire.
1885.
- 9 février : Impression du premier numéro de L'Écho de la France Catholique, journal édité par les services propres de la Mission mariste.
- 16 février : En relation avec la tentative des libérés de la transportation organisés en syndicat de créer à Bourail un journal, La Solidarité, le bruit court que le gouverneur a demandé à Paris la suspension de la liberté de la presse en Nouvelle-Calédonie.
- 30 mai : Promulgation du décret du 2 avril instituant un Conseil général en Nouvelle-Calédonie.
1886.
- 5 février : Première tentative de presse quotidienne avec la publication, éphémère, de L'Informateur ;
- 5 juillet : Prise de fonctions du gouverneur Nouët.
1887.
- 18 juillet : Décret portant création de l'indigénat.
- 16 novembre : Signature entre la France et la Grande-Bretagne d'une convention relative aux Nouvelles-Hébrides.
- 9 novembre : Le révérend Jones est expulsé de l'île de Maré, (Loyautés).
1888.
- 2 mars : Début de la publication du premier quotidien durable, Le Colon de la Nouvelle-Calédonie.
1889.
- 12 janvier : Prise de fonctions du gouverneur Pardon.
- 26 août : Publication du premier numéro de La France Australe, le plus durable des journaux parus en Nouvelle-Calédonie.
1890.
- 6 février : Un télégramme ministériel autorise la reprise de la traite néo-hébridaise.
- 1er novembre : Inauguration de l'église de Nouméa.
- 5 novembre : Dépôt de l'acte de société du Syndicat Calédonien (tour de côte).
1891.
- 14 avril : Début de l'intérim d'Auguste Laffon comme gouverneur.
1892.
- 28 janvier : Auguste Laffon devient gouverneur en titre.
- 16 février : Début de la publication du journal La CaIédonie, d'abord trihebdomadaire, il devient quotidien en 1893.
- 16 décembre : prise de fonctions du gouverneur Picquié.
1893.
- 16 octobre : inauguration du câble sous-marin entre l'Australie et la Nouvelle-Calédonie.
1894.
- Du 21 février au 10 juin : Intérim de Léon Gauharou au poste de gouverneur.
- Du 2 au 15 mai : Grandes fêtes locales à l'occasion du passage du navire de guerre russe Kreiser ;
- 10 juin : Prise de fonctions du gouverneur Paul Feillet ;
- Du 12 au 17 juin : Fêtes du cinquantenaire de la Mission mariste ;
- 26 novembre : Un télégramme apporte la nouvelle que le ministre des Colonies Delcassé a déclaré devant la Chambre des députés que la France n'enverrait plus de condamnés en Nouvelle-Calédonie.
1895.
- Un fort parti se constitue contre le gouverneur Feillet et sa politique de colonisation.
1896.
- En juin débute l'affaire d'Ina, Poindimié et Tiéti, où des indigènes dépossédés de leurs terres sans justes compensations protestent. Cette affaire qui ne trouvera une conclusion qu'en 1900 est le développement public de l'opposition de la Mission mariste à l'administration du gouverneur Feillet.
1897.
- 6 octobre : Décret affectant à la colonisation libre 43 000 ha prélevés sur le domaine.
- 24 octobre : Louis Simon "candidat officiel", est élu délégué au Conseil supérieur des Colonies.
- 27 octobre : Jean Audrain, maire de Nouméa hostile au gouverneur Feillet, est suspendu de ses fonctions.
1898.
- 5 mars : Élection de Paul Guiraud, opposant au gouverneur, qui devient maire de Nouméa.
- 27 mai : Décret modifiant la composition du Conseil général (six conseillers pour Nouméa, neuf pour l'intérieur).
- 4 et 11 septembre : Élection d'un Conseil général "feilletiste".
Cette année-là arrive en Nouvelle-Calédonie le dernier convoi de condamnés.
1899.
- 8 janvier : Dissolution du Conseil municipal de Nouméa.
- 26 février : Élection d'un Conseil municipal "feilletiste".
- 8 décembre : Début de l'épidémie de peste.
1900.
- Publication à Nouméa de l'ouvrage du père Pierre Lambert, Mœurs et Superstitions des Néo-Calédoniens.
1901.
- Au début de l'année, le Conseil général vote la séparation de l'Église et de l'État en Nouvelle-Calédonie.
1902.
- 22 octobre : Départ définitif du gouverneur Feillet.
1903.
- 2 septembre : Décès à Montpellier de Paul Feillet, gouverneur en titre de la Nouvelle-Calédonie et dépendances.
1905.
- 18 septembre : Décès de Mgr Fraysse à la Conception.