Le bal du directeur de l'Administration pénitentiaire

 

Article sans titre publié à la suite de l'article "Bal de la Mairie" en page 2 du journal L'Avenir de la Nouvelle-Calédonie daté du 13 mars 1888.

 

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On s'amuse d'ailleurs beaucoup pendant le carême. Les bals se succèdent dans les régions administratives.

Jeudi, M. et Mme de la Loyère avaient ouvert leurs salons. C'était aussi un bal travesti dont notre confrère du Colon qui paraît être dans les bonnes grâces du Directeur de l'Administration pénitentiaire, quoiqu'il soit ou peut-être parce qu'il est journaliste, a bien voulu nous donner un compte rendu très complet et très élogieux.

Nous ne voulons pas apporter une note trop sévère au milieu des notes gaies de notre confrère ; mais nous sommes forcé cependant de dire que si M. le Directeur de l'Administration pénitentiaire a le droit incontestable d'offrir un bal à ses amis, il n'a pas le droit de disposer, pour une réunion très exclusive et très privée, de la musique de la transportation, pas plus que celui de retenir dans son hôtel toute la nuit trois ou quatre condamnés pour servir ses invités.

Le Ministre a donné l'ordre de retirer les condamnés à tous les chefs de service, même au Gouverneur ; cet ordre ferait-il une exception en faveur de M. de la Loyère, par hasard ?

Les condamnés qui ont passé la nuit de jeudi à l'hôtel de M. le Directeur n'ont pas eu, d'ailleurs, beaucoup à se féliciter de cette petite fête. Quelques bouteilles de bière manquant à l'appel, deux ou trois, nous a-t-on dit, ils ont été sévèrement punis, et ils auront à méditer pendant quelques jours dans une sombre cellule, sur l'inconstance et l'ingratitude des grands.

Puisque nous sommes sur le chapitre des condamnés, est-il indiscret de demander comment il se fait qu'un condamné employé comme jardinier chez M. le Directeur de l'Intérieur, ayant été retiré à ce fonctionnaire en conformité de l'ordre ministériel, soit immédiatement passé au service de M. le Directeur de l'Administration pénitentiaire ?

Est-il encore indiscret de s'enquérir des fonctions que remplit cher M. le Directeur de l'Administration pénitentiaire le surveillant militaire qui ne bouge pas de son hôtel ?

On nous a affirmé que ce surveillant s'occupaient de choses absolument étrangères à sa profession ; que notamment, sur les instructions de M. le Directeur, il s'efforçait d'exceller dans la confection des plats de macaroni.

 

 

La résidence du directeur de l'Administration pénitentiaire.

 

Cette carte postale reproduit une photographie de la résidence du directeur de l'Administration pénitentiaire où eut lieu la petite fête dont il est question dans l'article ci-dessus.

 

Les plans du Nouméa de l'époque indiquent précisément où se situait l'hôtel du directeur de l'Administration pénitentiaire, un lot de ville en forme de triangle rectangle dont l'un des côtés de l'angle droit s'étendait le long du boulevard Vauban, depuis son intersection avec la rue Inkerman (actuellement rue Anatole France, c'est sous cet angle qu'est prise la photographie), jusqu'à son intersection avec la rue Turbigo (actuellement rue de Verdun).

Sur une parcelle symétrique, de l'autre côté de l'angle droit, se trouvait l'hôtel du gouverneur militaire, s'étendant de l'intersection avec la rue Inkerman jusqu'à l'intersection avec la rue Marignan (actuellement rue Jean Jaurès).